lundi 25 octobre 2010

George Frêche, le Montpelliérain éternel ?

"Montpellier est devenu orphelin" - Micro-trottoir

George frêche et la région de MontpellierIl y en a qui l'ont comparé avec dieu ou le diable. On l'a appelé le visionnaire et le bâtisseur. Pour d'autres, il était l'ennemi. Maintenant, George Frêche est tout simplement mort. Le 24 octobre, 18.15 heures, restera un moment imprégné dans la mémoire de Montpellier et des Montpelliérains.

"Je ne peux pas le croire," dit une femme dans la cinquantaine qui attend le tram à la gare de Montpellier. "Non, je ne l'ai pas aimé, mais, je ne sais pas comment l'exprimer. Je dirais qu'il m'a toujours semblé... immortel."

Immortel ? Toujours est-il que tous les Montpelliérains interrogés par l'équipe des Gens de Montpellier savent qui est George Frêche. Sans exception. Quelque quarante pour cent sont informés de son décès, ce lundi matin, et ceux qui l'apprennent le prennent pour une blague.

Montpellier et George Frêche"Avez-vous une caméra cachée ?" s'inquiète une dame dans la trentaine, "c'est une blague, n'est-ce pas ?" Un Monsieur d'à peu près le même âge se fâche. "Vous vous moquez de moi. George Frêche n'est pas mort." Et une dame un peu plus âgée : "Non, je ne peux pas le croire."

Est-ce possible de "le" croire ? "Montpellier est devenu orphelin". La dame dans la soixantaine est au bord des larmes. - Mais il y a toujours Hélène Mandroux, maire de Montpellier. - "Le maire ?" La dame hésite. "Bien sûr, elle est un bon maire. Mais c'est pas pareil." Et elle ajoute. "Il a plu toute la journée, hier. Même le ciel a pleuré sa mort." Elle lève les yeux pour regarder le ciel qui, ce matin, est d'un bleu clair immaculé. "C'est ce qu'il aurait voulu. Le soleil sur Montpellier."

George Frêche et l'Antigone de MontpellierQui était ce George Frêche à la mort duquel il est si difficile à croire ? "Un visionnaire", dit un Monsieur dans la quarantaine. "Un génie. C'est au moins ce que j'ai lu ce matin sur Internet. Pour moi, il était un homme énormément intelligent qui avait tellement envie du pouvoir qu'il en a perdu la tête." - "L'homme qui a fait de Montpellier ce qu'il est aujourd'hui", déclare une jeune femme. "C'est grâce à lui que Montpellier est devenu une ville internationale où on fait la fête tous les jours."

"Sans lui", explique une dame dans la cinquantaine, "Montpellier serait un village quelque part au Sud. La population aurait en moyenne soixante ans. Au plan culturel, on aurait notre ancien opéra, peut-être une salle de théâtre quelque part. Mais des lieux comme le Corum, l'Antigone, le Polygone ou même l'Odysseum, on n'en pourrait que rêver."

"George Frêche ?", réagit une autre dame d'à peu près le même âge. "Mort ? Vous êtes sérieux ?" Elle baisse la tête, puis ses yeux se fixent sur les maisons en face de l'arrêt du tram, sans les voir. "Pourquoi vous dites ça ? Il n'est pas mort, n'est-ce pas ? Je veux dire, vraiment mort."

Un Monsieur lui aussi dans la cinquantaine est déjà au courant. "Tout le monde a dit du mal de lui", constate-t-il. "Maintenant, où il est mort, ils ne diront que du bien. C'est comme ça." Et la dame à ses côtés ajoute : "Il a peut-être dit des choses qu'il ne fallait pas prononcer. Mais il était le seul qui avait le courage de le faire. Il a dit toutes ces choses que nous n'avons pas osé dire."

"Il était la voix du peuple", confirme une autre dame un peu plus jeune. "Tout le monde pense qu'il y a trop d'étrangers dans l'équipe de France. Mais on n'a pas le droit de le dire. Lui, George Frêche, il s'est pris le droit. Maintenant, on n'aura plus personne pour dire ce que nous pensons."

Un jeune homme qui est déjà informé du décès de George Frêche réagit d'un air rêveur. "Georgie, oui, il nous a quitté", dit-il. Puis il sourit légèrement. "Nous, c'est-à-dire mes amis et moi, on l'a toujours appelé Georgie. Il a fait semblant d'appartenir au peuple, fallait lui donner un nom en conséquence. Oui, il est mort. Hier soir. Une grande perte pour Montpellier. Politiquement, j'étais toujours contre lui. Mais il est vrai que c'était un grand homme. Des politiciens comme lui, ça n'existe plus."

"C'est l'homme qui a construit Montpellier", dit une étudiante avec un fort accent anglais. "Non, tu te trompes", intervient sa copine qui, elle aussi, étudie la langue française à Montpellier. "Il était maire de Montpellier et il a fait beaucoup pour sa ville. Montpellier", elle sourit, "a déjà existé avant lui."

"Et le tram ?" La dame dans la quarantaine se fait des soucis. "Sans George Frêche, la ligne trois ne sera pas construite. Ou pas immédiatement. Sans lui, les travaux traîneront éternellement."

"George Frêche ?" reprend un Monsieur du même âge. "Tiens, il est mort ? Je ne savais pas qu'il était encore en vie." Il hausse les épaules. "Non, sans blague. C'est triste qu'on ne puisse plus compter sur ses bouffonneries qui ont fâché tout le monde. Il faisait le clown, mais en vérité, il savait toujours ce qu'il voulait. Pour ceux qui l'ont considéré comme ennemi, il était un ennemi digne."

"Ce qu'il a fait va rester", explique un Monsieur un peu plus âgé. "On pensera à lui tant que Montpellier reste debout. Sa dernière œuvre était les statues à l'Odysseum. La statue de Lénine. Et les autres quatre. Maintenant, nous n'avons qu'à ériger une sixième statue. Celle de George Frêche. Il l'aurait bien mérité."
Photos et texte : copyright Doris Kneller

1 commentaire:

  1. Merci pour cet article intéressant.
    Qu'on aime ou pas le personnage, l'annonce de son décès m'a fait en quelque sorte de la peine, moi qui suit né en 77, l'année de sa première élection en tant que maire !
    Frêche aura marqué la vie de notre commune.

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