vendredi 27 août 2010

L'Esplanade Charles de Gaulle à Montpellier : Roquelaure, Édouard André et les eaux de l'Esplanade

De l'Esplanade de la Citadelle et la Roquelaure à l'Esplanade Charles de Gaulle de Montpellier

Esplanade Charles de Gaulle à MontpellierNuit sur l'Esplanade à Montpellier. Rien ne bouge. C'est l'été, l'air est un peu plus frais que pendant la journée. Il fait beau.

Tout à coup, au sud de l'allée centrale, un bruit. On devine plutôt qu'on ne la voit une silhouette qui s'approche doucement du bassin d'eau alimenté par le système des fontaines de Montpellier. Ensuite, la silhouette se fond dans l'ombre du bassin.

Peu après, une autre silhouette s'approche du bassin. On entend une espèce de "plouf", comme un corps qui plonge dans l'eau, suivi par un autre "plouf". Puis, un petit gloussement, suivi par un éclat de rire à peine étouffé.

Le promeneur nocturne, un peu curieux ou, peut-être, rempli d'un doute, même d'un soupçon, se dirige vers le bassin. Et ce qu'il découvre le laisse consterné, voire choqué. Toutes ses idéaux sur ce qui convient, qui est de bonnes mœurs, sont compromis : il aperçoit deux corps nus qui se baignent dans le bassin.

Montpellier et son EsplanadeEt il n'est pas le seul citoyen à être consterné. Les bonnes mœurs doivent être rétablies ! Ainsi, sur l'insistance des Montpelliérains, le bassin est démoli - celui du sud et, pour faire d'une pierre deux coups, aussi celui du nord de l'Esplanade.

Deux petits monuments sont détruits... mais les bonnes mœurs sont assurées. On est en 1780. À cette époque, l'Esplanade - notre Esplanade de Charles de Gaulle - compte déjà parmi les allées les plus belles de Montpellier. Toutefois, à peine soixante ans auparavant, le terrain de l'Esplanade ressemblait plutôt à un chantier. On y avait laissé les matériaux qui restaient de la construction de la Citadelle, et même les pierres ramassées après le siège de 1622 traînaient encore sur la future Esplanade.

Ce fut le duc de Roquelaure, un des fameux lieutenants du roi en Languedoc, qui en avait assez de se terrain "sauvage" si proche du centre de Montpellier. Ainsi, en 1724, il fit nettoyer le terrain est construire une promenade - une promenade qui, en honneur de son créateur, fut baptisé la Roquelaure.

Il est vrai que ce nom témoigne de peu d'imagination. Mais il est aussi vrai qu'au moment de la construction de la future Esplanade Charles de Gaulle, les pères de Montpellier n'avaient pas beaucoup de temps pour réfléchir. Car initialement, un autre nom a été prévu : Esplanade de la Citadelle. Ce nom, bien que, peut-être, pas plus original que celui de "Roquelaure", sembla logique au moment où la grande statue de Louis XIV était destinée à trouver sa place sur la nouvelle allée. Mais, encore avant que les plans de construction de l'Esplanade puissent être réalisés, Louis XIV fut logé au Peyrou, au point le plus haut de Montpellier. Ainsi, aux yeux des Montpelliérains, le nom d'Esplanade de la Citadelle perdit son sens.

Montpellier, Esplanade Charles de GaulleSi, aujourd'hui, nous admirons les arbres magnifiques qui longent l'Esplanade Charles de Gaulle, c'est surtout le nom d'Édouard André qui nous vient à l'esprit. Ce paysagiste et botaniste qui, en 1900, transforma l'ancienne Roquelaure dans l'Esplanade où, de nos jours, ont lieu des grandes manifestations comme les Estivales et le marché de Noël, était connu partout en Europe. Mais déjà presque 200 ans auparavant, lors de la construction de la première version de l'Esplanade, les arbres qui jetaient leur ombre sur la voie évoquèrent un nom célèbre : celui d'August Broussonet, le botaniste qui avait importé à Montpellier les Mûriers à Papier ou, en appellation scientifique, Broussonetia Papyrifera.

Mais l'ancienne Roquelaure aidait aussi aux responsables de Montpellier d'améliorer un peu les "fins des mois" de la ville : en 1794, lorsque les premières fontaines versaient leur fraîcheur sur l'Esplanade, un Montpelliérain s'intéressa au surplus de l'eau qui, inutilisée, s'écoula et se perdit dans les terres situées en dessous de la Roquelaure. Et on se mit d'accord qu'il pouvait les utiliser pour arroser son jardin - contre la pas très modique somme de 50 livres par an...
Photos et texte : copyright Doris Kneller

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